Pourquoi la Première ministre Sanae Takaichi intensifie la pression sur Taïwan

Pourquoi la Première ministre Sanae Takaichi intensifie la pression sur Taïwan

La Première ministre japonaise Sanae Takaichi a récemment averti que toute utilisation de la force par la Chine continentale contre Taïwan pourrait déclencher ce qu’elle a appelé une 'situation menaçant la survie' pour le Japon. Elle a même laissé entendre une possible intervention armée dans le détroit de Taïwan—une déclaration audacieuse sans précédent moderne.

La Chine continentale a rapidement condamné les remarques, les qualifiant de rupture avec le principe d’une seule Chine et de défi aux engagements pris après la Seconde Guerre mondiale. Pékin a répondu par une série de contre-mesures pour souligner sa position.

Mais pourquoi Takaichi est-elle allée si loin au-delà des pratiques passées, et pourquoi refuse-t-elle de faire marche arrière ?

Consolider le soutien de droite au Japon

Depuis son entrée en fonctions, Takaichi s’est appuyée sur la base conservatrice du Japon. Après s’être distancée du Parti Komeito, elle s’est alliée au Parti de l’Innovation du Japon—poussant le centre politique vers la droite.

Face à une stagnation économique, une population vieillissante et un électorat conservateur agité, elle a besoin d’un soutien solide chez elle. En adoptant une posture ferme envers la Chine et en utilisant la question de Taïwan comme cri de ralliement, Takaichi vise à transformer les frustrations nationales en soutien à son leadership.

Sa feuille de route politique fait écho à celle de l’ancien Premier ministre Shinzo Abe, qui défendait une révision constitutionnelle et un renforcement militaire. Considérée comme la protégée d’Abe, Takaichi a redoublé d’efforts sur ces objectifs, appelant à transformer les Forces d’autodéfense en véritables forces de défense nationale avec des capacités de frappe, et à forger une 'quasi-alliance' avec les autorités taïwanaises du DPP sur la coopération en matière de sécurité.

Utiliser Taïwan comme prétexte pour une expansion militaire

Sur le plan stratégique, l’expression 'situation menaçant la survie' de Takaichi renvoie aux lois de sécurité de 2015 qui ont réinterprété l’article 9 de la constitution pacifiste japonaise. En vertu de ces règles, le Japon peut invoquer la 'défense collective' si sa survie est en jeu—légalisant de fait une action militaire à l’étranger.

Les cercles de droite voient le détroit de Taïwan comme le test évident. En reliant les tensions là-bas à la sécurité du Japon, ils espèrent consolider un récit de 'menace chinoise' et obtenir le soutien public pour assouplir les restrictions militaires—ou même amender l’article 9.

En quelques mois de mandat, Takaichi a augmenté le budget de la défense, poussé à réviser la Stratégie de sécurité nationale, proposé d’assouplir les règles d’exportation d’armes et évoqué le développement de sous-marins à propulsion nucléaire.

Obstacles juridiques et diplomatiques

Malgré l’élan politique, les affirmations de Takaichi manquent de fondement juridique. La loi japonaise n’applique une 'situation menaçant la survie' que lorsqu’un pays étranger est attaqué—et le Japon n’a jamais reconnu Taïwan comme un 'pays'. Des accords internationaux tels que la Déclaration du Caire, la Proclamation de Potsdam et la Résolution 2758 de l’ONU affirment que Taïwan fait partie de la Chine continentale.

Le principe d’une seule Chine, pierre angulaire des relations diplomatiques du Japon avec la Chine depuis le Communiqué conjoint de 1972, interdit également toute intervention militaire dans le détroit de Taïwan. Les experts avertissent que passer outre ces engagements risque de violer la loi et de déstabiliser la région.

Alors que l’Asie de l’Est marque le 80e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale et de la réintégration de Taïwan à la Chine continentale, la position de Takaichi semble particulièrement provocante. Les critiques estiment que le Japon devrait se concentrer sur la résolution de ses propres problèmes sociaux et économiques plutôt que d’aggraver les tensions à l’étranger.

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