Vous vous êtes déjà senti coincé entre le marteau et l'enclume ? C'est ainsi que l'Union européenne s'est sentie cette semaine lorsqu'elle a décidé, à la dernière minute, de suspendre les contre-tarifs prévus de 93 milliards d'euros sur les importations américaines.
Le porte-parole du commerce de Bruxelles, Olof Gill, a expliqué que la suspension avait été déclenchée dans le cadre d'une procédure d'urgence. La mesure doit encore obtenir une majorité simple des votes des États membres dans les deux semaines. Pendant la pause de six mois, les deux parties continueront de travailler sur l'accord global. Si Washington ne respecte pas ses engagements, l'UE pourra réactiver instantanément les contre-mesures.
Mais toutes les capitales n'étaient pas satisfaites de ce recul. Des acteurs clés comme Paris et Berlin se réchauffaient à l'idée d'une action plus ferme. Lars Klingbeil, vice-chancelier et ministre des finances de l'Allemagne, a critiqué Bruxelles pour avoir adopté une approche plus douce, affirmant que l'Europe mérite des tactiques de négociation plus fortes.
Dans le cadre de l'accord convenu fin du mois dernier, la plupart des exportations de l'UE vers les États-Unis sont soumises à un tarif de 15 %, tandis que le bloc s'est engagé à augmenter ses achats de produits énergétiques américains et à canaliser davantage d'investissements vers le marché américain. Pendant ce temps, les États-Unis maintiendront des droits de douane de 50 % sur l'acier et l'aluminium européens pour l'instant, mais les deux parties visent à remplacer ces droits par un système de quotas après le 1er août.
L'ancien chef de la politique étrangère de l'UE, Josep Borrell, est allé plus loin, avertissant que l'accord compromet les intérêts économiques de l'Europe et approfondit la dépendance politique envers Washington. Il a souligné que les courts créneaux de négociation, les calendriers serrés des réunions et certains objectifs de l'accord – comme l'importation de 750 milliards de dollars de gaz naturel américain sur trois ans – semblent irréalistes compte tenu du fonctionnement des marchés privés. En matière de défense, l'engagement de l'UE à acheter du matériel militaire américain entre en conflit avec son objectif déclaré de construire une industrie indépendante.
De nombreux analystes pensent que le prochain cycle de négociations pourrait durer des mois. En suspendant plutôt qu'en annulant les tarifs, Bruxelles gagne du temps pour affiner sa stratégie dans les futurs cycles de négociation commerciale avec les États-Unis.
Reference(s):
EU halts 93-bln-euro tariffs on U.S. goods despite members' dissent
cgtn.com